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Sur un fond bleu dégressif, se dégagent des visages à deux tons, des poignées de mains, des signes et une combinaison de couleurs le tout provenant du dessin et de la cire de bougie. Un tableau à la cotonnade dosé dans une teinture sous ses différents pigments. Intitulé, le « Parlement », l’œuvre a été classée première dans la discipline batik en la catégorie art plastique à la 21e édition de la Semaine nationale de la culture (SNC Bobo 2024).

Le « parlement », l’œuvre lauréate en discipline batik de la 21e édition de la SNC

Cette production artistique est l’œuvre de l’artiste plasticien batikier, Evance W. Pitroipa. Cette production artistique selon lui, fait ressortir l’importance de l’union, du parlement et son rôle dans une société à travers deux tableaux. « Tandis que l’un met en lumière l’assemblée traditionnelle, le sous l’arbre à palabre, l’autre symbolise l’assemblée nationale ou le parlement moderne », a décrit l’artiste. Par cette œuvre, « je mets l’accent sur l’importance du parlement, de l’assemblée dont les orientations doivent refléter celles de tout un chacun et du peuple, c’est aussi une intention à faire comprendre la noble tâche que revêt le parlement dont le travail doit être en phase avec le souhait du peuple » a-t-développé.  Pour ce sacre, Evance Pitroipa avoue que c’est un sentiment de joie, de fierté qui l’anime. D’après lui, ses participations infructueuses au cours des éditions de 2002, 2004, 2006, 2008, lui ont permis d’améliorer sa qualité de travail. Aussi, « J’éprouve un sentiment de satisfaction et de mérite », a confié le lauréat. « Evance est un jeune dynamique qui a l’amour du travail bien fait et son prix ne m’étonne pas et nous procure une fierté et un honneur à plus d’un titre d’autant plus que tous les 3 premiers prix dans cette discipline reviennent au Centrenational de formation en artisanat d’art – Birgui Julien Ouedraogo (CNFAA-BJO) », s’est réjoui Vincent Ouedraogo, artiste batikier et chef atelier du CNFAA-BJO.

          Les 3 prix du centre

Abdoulaye Kaboré, président de l’AANG : «  les 3 prix obtenus par le centre est une preuve manifeste que les artistes du centre travaillent énormément »

En effet, Saidou Tapsoba et Aimé Ouiya avec les œuvres respectives, « effort de guerre » et « vision commune », occupent la deuxième et la troisième place dans la même discipline, batik. « Cela nous va droit au cœur et reste une preuve manifeste que les artistes du centre ont du talent et travaillent énormément. On aurait souhaité en avoir plus mais s’adjuger les 3 prix au palmarès officiels dans la même discipline à une SNC, se fête et c’est même une fierté et un honneur pour le centre », s’est félicité le président de l’Association des artistes de la nouvelle génération (AANG), Abdoulaye kaboré, artiste sculpteur fondeur, et par ailleurs vice-président de la fédération nationale des arts plastiques et appliqués. « Il n’y a pas de secret en la matière si ce n’est le travail car tout effort se paie et nous osons espérer que cette prouesse de nos membres fera encore davantage de la visibilité au profit du centre », a ajouté Abdoulaye.

Les domaines de prédilections de l’artiste Evance Pitroipa, sont la vie traditionnelle, l’abstrait mais aussi des figurines

Issu d’une famille d’artistes, Evance W. Pitroipa semble être né avec un crayon à la main. En effet, déjà tout petit il n’a de cesse laisser des empreinte au sol à travers des dessins qu’il produisait tout le temps. C’était d’après son frère son passe-temps favori. En 1987, alors qu’il était en classe de sixième, il prit part à un concours de dessins initié par les nations unies où il sortit premier. Dès lors, son père dessinateur l’encourage et l’initie à certaines astuces. Piqué par le virus du dessin, il rendit visite à son frère cadet qui suivait une formation en peinture au Centre national d’artisanat (CNA) à l’époque. Et cela n’a fait qu’aiguiser sa passion pour l’art plastique. « Lorsque je suis arrivé au centre et que j’ai vu les ateliers et les artisans à l’œuvre je me suis intéressé et c’est ainsi que je me suis inscrit afin de suivre une formation d’un an en dessin », a révélé Evance. A partir de 1996, Evance se consacra entièrement au batik sous la conduite du formateur Amidou Sissao. « Je me suis perfectionné dans le dessin et prenant goût pour un autre corps de métier je me suis orienté plus tard au batik, un art semblable à quelque points près à la peinture », a confié l’artiste. D’après lui, la peinture est faite sur une toile et on y applique de la peinture tandis que le batik, lui est trempé dans de la teinture. Marié et père de 4 filles, Evance Pitroipa, confie que sa signature accompagne les œuvres qui traitent de la vie traditionnelle de l’abstrait mais aussi des figurines. Il avoue avoir beaucoup avec cet art qui nourrit son homme. « Avec le batik nous avons découvert d’autres horizons comme l’Europe à travers des formations dans des écoles et collèges, nous avons aussi produit à plusieurs reprises des expositions au Havre en France en Allemagne et en Afrique, où nous avons participé aux différentes foires contemporaines comme celle du Sénégal », a livré le lauréat.

              Les artistes ont besoin de financement et d’assistance technique

Le mécanisme d’achat des œuvres d’art est une belle initiative selon Vincent Ouedraogo, chef d’atelier

Cependant, l’artiste reconnait que la crise sécuritaire et humanitaire que vit notre pays, prend en otage leur épanouissement et rend difficile la vie des artistes en général. « Dire que la culture a pris un coup suite au déficit sécuritaire est peu le dire, le constat il est là, nous manquons de visiteurs et les portes de l’extérieures nous sont fermées, plus de galerie, d’exposition ou de foire », a déploré le batikier. Selon lui, pour y remédier, il faut qu’il ait des expositions, des visites et des achats sans oublier le financement des projets culturels. En la matière, en dehors de la tribune qu’offre la SNC, l’Etat a mis en place le mécanisme d’acquisition des œuvres d’art. Pour Vincent Ouedraogo, les retombées de ce mécanisme sont jugées insignifiantes par rapport à la forte sollicitation des artistes. « Le mécanisme d’achat des œuvres d’art est une belle initiative mais au vu de l’immense sollicitation des artistes un effort supplémentaire est à faire », a jugé le chef d’atelier du centre. Pendant qu’il pose les traits d’une vanneuse, Vincent ajoute que les artistes ont besoin de financement mais aussi d’appui technique telle la formation et des opportunités d’affaires comme l’organisation des galeries nationales qu’internationales.

Le Centre National de Formation en Artisanat
d’Art-Birgui Julien Ouedraogo (CNFAA-BJO) compte 11 corps de métiers dont cet
atelier de fonte et de sculpture en bronze

Afin de contribuer à l’amélioration de leurs conditions, les artistes du centre se sont réunis en association dénommée, Association des Artistes de la Nouvelle Génération (AANG), d’après Abdoulaye Kaboré, le président. « Cette structure associative dont le siège est au sein du CNFAA-BJO, compte 11 corps de métiers et a pour missions de contribuer à la promotion des artistes du centre et à la valorisation de leurs œuvres », a indiqué le président.

Pour sa part, le lauréat confie avoir une quinzaine d’œuvres déclarées au BBDA dont la Crise de la liberté, le duo musical et le brassage ethnique entre autres. Evance se dit être prêt pour les prochaines échéances de la SNC. Il rêve de pouvoir faire connaitre son art à travers des expositions dans le pays et sur le plan international.

                                                                                                       José Marie